4 Questions à Laurence Jenard, directrice de la coopérative de presse "Medor"
Pourriez-vous présenter votre projet en quelques mots ?
« Médor est un projet médiatique qui a été créé en 2014 à la suite du constat que le journalisme d’investigation existe de moins en moins ; ou en tout cas, les conditions pour qu’un journalisme soit bien fait n’existent plus. Du coup, 19 personnes, dont une dizaine de fondateurs, se sont mises autour de la table pour recréer les conditions pour faire du bon journalisme. L’idée de base était de prendre son temps pour permettre une vraie démarche journalistique. Et cela s’est traduit par la création d’un trimestriel qui est tout à fait indépendant. Cela signifie que les recettes ne sont pas liées aux publicités ou à de grands financiers, mais aux citoyens, aux abonnements et aux ventes en librairie. La structure de l’entreprise qui correspondait le mieux à ces valeurs était la coopérative. »
Pourquoi avez-vous choisi la coopérative ?
« Alors, pour deux raisons. D’abord pour une raison pragmatique, c’est-à-dire pour financer le projet dès le départ. Les fondateurs n’avaient pas suffisamment de sous et donc ils se sont dit : « élargissons la prise de capitale ». Et ensuite, parce que les valeurs de la coopérative (1 personne = 1 voix, solidarité entre les coopératives, etc.) correspondaient aux valeurs que les fondateurs voulaient voir transparaître dans le projet. »
Qu’avez-vous retiré de l’accompagnement de Febecoop ?
« Outre une expertise technique qui nous a bien aidés, le travail sur les statuts a permis qu’ils correspondent à notre réalité et qu’ils traduisent nos valeurs. Les statuts, pour qu’ils soient bien faits, doivent refléter la gouvernance de la société qui elle-même doit refléter les valeurs de la société. Et cela ne se fait pas instinctivement. Et donc, cela vaut la peine de reprendre le temps de comprendre tous les mécanismes inscrits dans les statuts et leurs conséquences. Je trouve que c’est un boulot qu’on a trop tendance à négliger. Le fait d’avoir quelqu’un d’extérieur pour le faire avec nous, c’est super intéressant. Et dans le prolongement de cette réflexion, c’est important de formaliser la gouvernance, les procédures, les structurations parce qu’on ne sait jamais ce qu’il peut se passer. C’est vraiment le socle de l’entreprise. Les personnes changent et on a au moins ce socle sur lequel se reposer. »
Un conseil à donner à ceux qui envisagent de se lancer dans l’entrepreneuriat coopératif ?
« Se faire bien accompagner. Et aussi, comme je le disais, veiller à l’importance de la procédure et de la structure. Pas pour être procédurier sensu stricto, mais justement parce que c’est cela qui garantit la transparence, la bonne communication, et plus généralement le socle commun de tout le monde. C’est « facile » d’édicter des valeurs, mais les traduire dans une structure et puis être fidèle à cette structure, c’est cela le plus important et la première concrétisation des valeurs, finalement. »